Thierry LEVY est avocat au barreau de Paris.
Il écrit depuis longtemps. Il écrit beaucoup, et il écrit habituellement de fort bons livres.
J’avais lu autrefois son Justice sans Dieu, qui, au travers d’une relecture original et documentée des travaux de Philippe de Beaumanoir, jurisconsulte du XIIIème, nous proposait un retour vers un système accusatoire, plus équitable et plus juste.
J’avais également apprécié son Eloge de la barbarie judiciaire, où il développait cette thèse qui est la sienne depuis longtemps, à savoir que tout est joué au stade de la garde à vue, où l’avocat ne peut jouer aucun rôle efficace (à l’exception de l’entretien purement psychologique prévu par la loi).
Pratiquant également le droit de l’application des peines, j’avais retrouvé son goût pour le paradoxe, avec lequel il jouait volontiers dans Nos têtes sont plus durs que les murs des prisons, ouvrage singulier dans lequel il proposait l’extension de la surveillance électronique pour l’ensemble des peines, et surtout pour les plus longues.
C’est donc avec beaucoup d’entrain que je me suis lancé dans la lecture de Labori, pour Zola, pour Dreyfus, contre la terre entière, livre co-écrit par Thierry Levy et Jean-Pierre Royer, paru aux Editions Louis Audibert
Et j’ai été déçu.
Déçu tout d’abord parce que l’ouvrage m’est rapidement apparu comme une biographie prétexte, éditée très opportunément en pleine période de commémoration de l’arrêt prononcé en 1906 par la Cour de cassation, réhabilitant le capitaine Dreyfus.
Je suis passionné par les biographies, lorsqu’elles restituent la vie d’un personnage historique au travers d’un véritable travail de recherche, réalisé sur l’ensemble d’une vie. J’aime les biographies, lorsque le texte renvoie à des milliers de notes, elles-mêmes nourries par des milliers de références. Je veux avoir l’impression que l’auteur, que l’historien a épuisé toutes les sources, consulté tous les fonds, lus tous les ouvrages sur la personne et sur l’époque.
Dans le Labori de Thierry Levy, rien de tel. Après un passage obligé par l’enfance et les origines familiales, nous arrivons très rapidement à l’entrée de Fernand Labori au barreau de Paris, avec un passage rapide et obligé sur le discours qu’il a prononcé à l’occasion de la rentrée solennelle du barreau, en qualité de deuxième secrétaire de la conférence du stage.
Nous allons ensuite l’accompagner dans l’affaire Dreyfus, et notamment à l’occasion du procès d’Emile Zola devant la Cour d’assises : l’ambiance est restituée, sans plus, et je ne suis pas certain que Maurice Garçon ait été moins complet dans son Histoire de la justice sous la IIIème république.
Les auteurs nous présentent ensuite l’aventure du second conseil de guerre, tenu à Rennes, et retracent avec beaucoup de finesse les conflits qui apparaissent sur la ligne de défense du capitaine Dreyfus, et notamment l’opposition de Labori, qui souhaitait un combat frontal contre l’accusation et l’armée, et Edgard Demange, l’autre avocat de Dreyfus, qui ne voulait pas faire le procès de l’institution militaire.
Après la tragédie de Rennes, Labori ayant refusé de plaider, une très grande déception : les événements postérieurs de la vie de Labori sont expédiés, et toujours analysés au regard du ressentiment du grand avocat à l’égard de la famille Dreyfus.
On reste donc un peu sur sa faim, d’autant plus que l’on pouvait attendre mieux d’un avocat rendant hommage à l’un de ses prestigieux prédécesseurs à la conférence du stage. On pouvait également attendre mieux d’un historien, Monsieur Royer, ayant commis un ouvrage sur l’histoire de la IIIème république.
Plus désagréable encore : le style a pâti de cette écriture à quatre mains, certains passages manquant singulièrement de légèreté et d’élégance.
Enfin, l’iconographie n’est pas non plus à la hauteur du sujet, l’ensemble des photographies étant très largement connus, pour avoir été publiées en 2002 dans un ouvrage consacré à Paris et ses avocats.
Cet ouvrage ne manque pas cependant pas totalement d’intérêt, dans la mesure où il restitue à grands traits l’épopée d’un avocat singulier dans une affaire exceptionnelle, constitutive de notre histoire et de notre identité.
Il écrit depuis longtemps. Il écrit beaucoup, et il écrit habituellement de fort bons livres.
J’avais lu autrefois son Justice sans Dieu, qui, au travers d’une relecture original et documentée des travaux de Philippe de Beaumanoir, jurisconsulte du XIIIème, nous proposait un retour vers un système accusatoire, plus équitable et plus juste.
J’avais également apprécié son Eloge de la barbarie judiciaire, où il développait cette thèse qui est la sienne depuis longtemps, à savoir que tout est joué au stade de la garde à vue, où l’avocat ne peut jouer aucun rôle efficace (à l’exception de l’entretien purement psychologique prévu par la loi).
Pratiquant également le droit de l’application des peines, j’avais retrouvé son goût pour le paradoxe, avec lequel il jouait volontiers dans Nos têtes sont plus durs que les murs des prisons, ouvrage singulier dans lequel il proposait l’extension de la surveillance électronique pour l’ensemble des peines, et surtout pour les plus longues.
C’est donc avec beaucoup d’entrain que je me suis lancé dans la lecture de Labori, pour Zola, pour Dreyfus, contre la terre entière, livre co-écrit par Thierry Levy et Jean-Pierre Royer, paru aux Editions Louis Audibert
Et j’ai été déçu.
Déçu tout d’abord parce que l’ouvrage m’est rapidement apparu comme une biographie prétexte, éditée très opportunément en pleine période de commémoration de l’arrêt prononcé en 1906 par la Cour de cassation, réhabilitant le capitaine Dreyfus.
Je suis passionné par les biographies, lorsqu’elles restituent la vie d’un personnage historique au travers d’un véritable travail de recherche, réalisé sur l’ensemble d’une vie. J’aime les biographies, lorsque le texte renvoie à des milliers de notes, elles-mêmes nourries par des milliers de références. Je veux avoir l’impression que l’auteur, que l’historien a épuisé toutes les sources, consulté tous les fonds, lus tous les ouvrages sur la personne et sur l’époque.
Dans le Labori de Thierry Levy, rien de tel. Après un passage obligé par l’enfance et les origines familiales, nous arrivons très rapidement à l’entrée de Fernand Labori au barreau de Paris, avec un passage rapide et obligé sur le discours qu’il a prononcé à l’occasion de la rentrée solennelle du barreau, en qualité de deuxième secrétaire de la conférence du stage.
Nous allons ensuite l’accompagner dans l’affaire Dreyfus, et notamment à l’occasion du procès d’Emile Zola devant la Cour d’assises : l’ambiance est restituée, sans plus, et je ne suis pas certain que Maurice Garçon ait été moins complet dans son Histoire de la justice sous la IIIème république.
Les auteurs nous présentent ensuite l’aventure du second conseil de guerre, tenu à Rennes, et retracent avec beaucoup de finesse les conflits qui apparaissent sur la ligne de défense du capitaine Dreyfus, et notamment l’opposition de Labori, qui souhaitait un combat frontal contre l’accusation et l’armée, et Edgard Demange, l’autre avocat de Dreyfus, qui ne voulait pas faire le procès de l’institution militaire.
Après la tragédie de Rennes, Labori ayant refusé de plaider, une très grande déception : les événements postérieurs de la vie de Labori sont expédiés, et toujours analysés au regard du ressentiment du grand avocat à l’égard de la famille Dreyfus.
On reste donc un peu sur sa faim, d’autant plus que l’on pouvait attendre mieux d’un avocat rendant hommage à l’un de ses prestigieux prédécesseurs à la conférence du stage. On pouvait également attendre mieux d’un historien, Monsieur Royer, ayant commis un ouvrage sur l’histoire de la IIIème république.
Plus désagréable encore : le style a pâti de cette écriture à quatre mains, certains passages manquant singulièrement de légèreté et d’élégance.
Enfin, l’iconographie n’est pas non plus à la hauteur du sujet, l’ensemble des photographies étant très largement connus, pour avoir été publiées en 2002 dans un ouvrage consacré à Paris et ses avocats.
Cet ouvrage ne manque pas cependant pas totalement d’intérêt, dans la mesure où il restitue à grands traits l’épopée d’un avocat singulier dans une affaire exceptionnelle, constitutive de notre histoire et de notre identité.