20 octobre 2006

« C’est possible, c’est réalisable ! »

Que les professionnels du droit se le disent : le droit pénal demeure en pleine mutation, et l’avenir nous réserve un déluge pléthorique de textes sans précédent.

Le ministre de l’intérieur, qui est en campagne électorale, vient de proposer un nouveau renforcement de notre appareil répressif : il appartient aux juristes que nous sommes de participer à l’élaboration technique des nouvelles règles qui gouverneront demain notre droit pénal et notre procédure.

Prévoir un placement obligatoire en détention provisoire pour toute personne mise en examen du chef d’atteinte à l’intégrité physique.

Le principe directeur est simple : nous ne pouvons plus accepter la place indigne réservée aux victimes dans notre système judiciaire, et il faut apporter une réponse radicale à toute atteinte à l’intégrité physique.

La réforme devra donc prévoir la mise en place d’un placement obligatoire en détention provisoire, sans saisine préalable du juge des libertés et de la détention, dès lors que les faits reprochés à la personne mises en examen sont prévus par le livre 2 du code pénal.

Après la mise en examen, le juge d’instruction délivrera automatiquement un mandat de dépôt d’une durée initiale de 4 mois, automatiquement renouvelable 2 fois par le juge d’instruction sans débat contradictoire (il conviendra également de limiter l’exercice d’un appel devant la chambre de l’instruction à des conditions strictes conditionnant sa recevabilité, par exemple que le détenu justifie de motifs graves et pertinents tendant à sa mise en liberté, le président de la chambre de l’instruction disposant en contrepartie du pouvoir de déclarer non-admis l’appel par ordonnance non motivée, et non susceptible de recours).

Les demandes de mise en liberté seraient également interdites, jusqu’à ce que le juge d’instruction ait pris une ordonnance de règlement, le principe étant d’instaurer une détention qui soit de principe, la liberté demeurant exceptionnelle pour ce type d’infraction.

Pour indemniser les détentions qui après ordonnance de non-lieu apparaîtraient comme non justifiées, le législateur pourra mettre en place un système d’indemnisation automatique, permettant au juge d’instruction d’allouer à la personne mise en examen détenue une indemnité forfaitaire par journée de détention (qui serait fixée par décret). Cette indemnisation automatique permettrait aux services du premier président de ne plus s’occuper d’une bonne partie du contentieux de la réparation des détentions provisoires.

La Cour d’assises, juridiction compétente pour connaître de toute infraction commise à l’encontre de personnes dépositaires de l’autorité publique.


Cette règle de compétence salutaire devra être étendue, c’est l’évidence, à toute infraction, dès lors qu’elle a été commise au préjudice d’un policier, d’un gendarme ou encore d’un pompier (avec une extension progressive vers l’ensemble des professions relevant d’un service public).

Toute infraction, y compris les outrages, les injures et diffamations, relèveront de la compétence de la cour d’assises, qui retrouvera ainsi la compétence naturelle qu’elle avait aux premiers temps de la loi sur la presse.
Introduction du jury populaire dans les tribunaux correctionnels


Pour parer au laxisme ambiant tant dénoncé, il convient de parfaire la composition des juridictions correctionnelles selon un principe de gradation, fixée en raison de la peine encourue ou de la nature de l’infraction.

Juge unique pour les délits de moindres importances, tribunal correctionnel en formation collégiale pour les délits d’importance moyenne, et tribunal correctionnel à jury populaire pour les délits les plus graves.

Pour permettre au jury d’exercer pleinement son pouvoir juridictionnel, il conviendra de réserver au "tribunal proprement dit" (les trois magsitrats professionnels) les questions purement juridiques (contentieux de nullités, purement procédural). Les décisions prononcées par le tribunal ainsi composé ne seront pas motivées, et seront susceptibles d’appel devant des chambres des appels correctionnels à jury populaire.

Bien évidemment, le jury se prononcera sur la culpabilité, mais encore sur la peine qu’il convient de prononcer. Il participera également à toute décision sur le maintien en détention, ou sur la délivrance d'un mandat de dépôt à l'audience, par décision non motivée.

Instauration d’une peine plancher pour les multi-récidivistes.


Il est temps en effet de punir sévèrement ces délinquants qui démontrent par leurs comportements qu’ils sont inaccessibles à la sanction pénale. Le ministre de l’intérieur souhaite que le délinquant puisse prévoir la peine qu’il risque d’encourir s’il a nouveau condamné.

Mais il convient également d’adapter la peine encourue, et que la juridiction sera dans l’obligation de prononcer en cas de condamnation, à la situation particulière du délinquant.

D’où l’introduction dans le code pénal de la notion de « peine cumulée individualisée » (dite PCI) : pour tout délinquant qui aura été condamné à plus de trois reprises, poursuivi en état de récidive légale, la peine cumulée individualisée que le tribunal sera tenu de prononcer sera égale au cumul de l’ensemble des peines précédemment prononcées, dans la limite du maximum légal encouru pour l’infraction visée à la prévention, étant précisé que les peines prononcées et assorties du sursis simple ou du sursis avec mise à l’épreuve seront considérées, pour la détermination de la PCI, comme des peines fermes, que les sursis aient été révoqués ou non.

Exemple pratique : Monsieur X, poursuivi pour vol aggravé par deux circonstances, a été condamné à 5 reprises aux peines suivantes : 2 mois avec sursis, 6 mois avec SME, 1 an ferme, 18 mois fermes, 6 mois fermes : la PCI sera de 3 ans et 8 mois d’emprisonnement ferme. Le tribunal sera tenu de prononcer cette peine, sans pouvoir la diminuer mais en pouvant l'aggraver par décision spécialement motivée.
En cas de reconnaissance préalable de culpabilité, le procureur pourra recourir à la CRPC, sans disposer toutefois de la possibilité de proposer à l'homologation du tribunal une peine inférieure à la PCI, le seul aménagement possible demeurant la possibilité d'assortir une partie de la peine qui ne saurait excéder un tiers de la peine totale d'un sursis avec mise à l'épreuve.
Cette faveur exceptionnelle encouragera les délinquants à reconnaître leur culpubalité, permettant ainsi une meilleure gestion du traitement en temps réel.

Ce système simple a d’autre part l’avantage de permettre au délinquant de connaître, avant qu’il ne commette une nouvelle infraction, la peine qui sera prononcée contre lui s’il récidive, car nul ne connaît mieux son casier judiciaire que le délinquant lui-même.

Il est donc à souhaiter qu’un projet de loi soit immédiatement déposé, et que la représentation nationale oeuvre sans désemparer à l’édification d’un monument de notre système pénal !

1 commentaire:

Polynice a dit…

De toute façon, les idées, ils les trouvent facilement...